Unrésumé critique du livre d'Adrien Abauzit La France divisée contre elle-même qui relate le remplacement du Français par l'hommeSamedi 17 novembre, un mouvement hétéroclite et né sur les réseaux sociaux menace de bloquer 1 000 sites en France afin de protester contre la hausse des taxes sur le carburant. Ralliés derrière le symbole du “gilet jaune” présent à bord des voitures en cas d’incident, les mécontents protestent désormais contre les mesures de l’exécutif dans leur ensemble. “Le gouvernement français a été pris de court par le mécontentement qui a circulé sur les réseaux sociaux contre la gestion de M. Macron”, souligne le Times, qui indique que “sa tournée de commémorations de l’armistice de la Première Guerre mondiale a été entravée par les protestations”. L’exécutif ne cède pas sur le fond Résultat, “c’est le branle-bas de combat dans l’exécutif”, relate le journal belge Le Soir, qui y voit “le signe d’une fébrilité certaine devant cette colère sociale atypique née de la hausse du prix des carburants”. Le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé une série de mesures pour calmer le mouvement, comme la défiscalisation d’indemnités kilométriques, l’extension des “chèques énergie” ou la prime à la conversion pour acheter un véhicule moins polluant. “Mais l’exécutif n’a rien cédé sur l’essentiel, à savoir la taxation des carburants, motivée par la transition écologique”, constate le quotidien de Bruxelles. “Le feu s’est d’autant plus propagé que le terrain était inflammable, analyse Le Soir. Le pouvoir d’achat stagne, mais pas seulement.” “Il y a eu un certain nombre de colères disparates qui se sont cristallisées chez les automobilistes, explique un familier de l’Élysée. Il y a la hausse du prix des carburants, mais aussi la limitation de la vitesse à 80 km/h sur les départementales.” Ce mouvement est aussi le signe des divisions françaises, avance le journal belge “Au malaise social se greffe une dimension territoriale. L’impression prévaut qu’Emmanuel Macron est aussi le président des villes’ et néglige la France périphérique.” “Le mouvement a divisé la France à mesure que la colère monte dans les zones rurales et les petites villes, où la plupart des gens prennent la voiture pour aller au travail”, rapporte le Times. Le journal britannique met l’accent sur la récupération politique très rapide de cette colère, notamment par l’extrême droite, “et à un degré moindre par les républicains de Laurent Wauquiez”. De son côté, Le Soir note que “l’extrême droite attise le feu même si sa chef de file ne prendra pas elle-même part aux manifestations”.
Richard Werly est le correspondant permanent à Paris du quotidien suisse Le Temps. Il a grandi dans la Nièvre au pied de la ligne de démarcation. Il répond à mes questions à l’occasion de la parution de son ouvrage La France contre elle-même » chez Grasset. Vous avez arpenté la ligne de démarcation qui avait divisé la France à partir de 1940 et vous trouvez de curieuses permanences… La ligne de démarcation de 1940, imposée par l’occupant et le vainqueur allemand, n’avait bien sûr rien à voir avec les fractures d’aujourd’hui qui sont sociales, économiques, identitaires, religieuses. Il ne s’agissait donc pas pour moi d’enquêter sur une quelconque analogie. Le rapprochement historique, en revanche, tient sur un sujet qui, je crois, sous-tend beaucoup des préoccupations actuelles des Français l’angoisse de la disparition de la France. Ce thème, rebattu durant la campagne présidentielle par certains candidats, en dit long sur le malaise généralisé du pays. Or s’il est une période qui prouve, avec son lot d’accommodements ou de comportements inacceptables, que la France ne disparait pas même au cœur de la pire tourmente, c’est 1940. La ligne de démarcation aurait dû/devait briser la France. Cela n’a pas été le cas. Pourquoi ? Parce que le pays s’est réveillé plus solide que la débâcle de 1940 n’aurait pu le laisser penser. La France de 1940, c’est peut-être l’esprit d’héroïsme ordinaire qui manque tant aujourd’hui. Ce sentiment qu’il n’y a pas le choix. Il faudra se battre pour que survive la République. Au sens propre comme au sens figuré. Mais vous vous demandez pourquoi le pays ne s’est pas effondré en 1940-1941 alors qu’aujourd’hui on parle d’un archipel français avec des fêlures à tous les étages… D’abord un évident rectificatif la France de 1940 commence par s’écrouler. Elle n’existe plus. C’est la débâcle. L’armée française est en déroute. Tout cela, les Français le vivent dans le plus grand des désespoirs. Mais l’histoire de la ligne de démarcation instaurée avec l’armistice de juin 1940 montre comment, face à cette séparation du pays en deux, l’âme française se rebelle et tient bon malgré tout. Il y a eu, on le sait et les historiens l’ont montré, quantité de salauds » qui ont pactisé avec l’occupant pour mener les plus sales besognes, dénoncer les résistants, dénoncer les juifs, etc… Le régime du Maréchal Pétain n’est en rien le sauveur de la France. Ce qui sauve la France, ce sont les Français. Certains sont des héros. Beaucoup s’accommodent de l’occupation nazie. Mais ils retrouvent surtout, de part et d’autre de la ligne de démarcation, le sens de l’unité et de la fraternité. Il faut tenir ensemble. Tenir ensemble ces deux mots, aujourd’hui, manquent terriblement, je crois, dans l’univers politique national. Pour vous, l’héroïsme aujourd’hui consisterait à repérer et réparer ces multiples plaies qui défigurent la France… L’héroïsme qui fait société » est l’héroïsme ordinaire. L’histoire de la ligne de démarcation est de ce point de vue éloquent. D’un seul coup, parce que cette ligne passe en bas de chez eux, qu’elle emprunte le tracé de la rivière voisine ou qu’elle coupe à travers leurs champs, des paysans deviennent des passeurs et des justes ». Les cheminots forment une extraordinaire chaîne de solidarité, de part et d’autre de la ligne. J’aime ce mot passeurs » car il dit bien ce qui manque peut-être à la France de 2022 des passerelles qui redonnent confiance entre les îles de l’archipel français. Est-ce naïf de penser cela ? Peut-être. Mais je le répète en 1940, la France aurait pu/du disparaitre. Or cela n’a pas été le cas. La France est plus solide que beaucoup de Français ne le pensent. C’est aussi la leçon de mon voyage le long de l’ex ligne de démarcation. Cet entretien est également disponible sur MediapartLeClub.
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