Lesnouvelles oeuvres au programme 2022-2023 seront disponibles prochainement. A noter : les 5 oeuvres de l'ancien programme seront supprimĂ©es fin aoĂ»t 2022 : Mme de Lafayette, La Princesse de ClĂšves; Sarraute, Enfance; Stendhal, Le Rouge et le Noir; Verne, Voyage au centre de la Terre; Yourcenar, MĂ©moires dâHadrien
ANTHOLOGIE DE FABLES DE LA FONTAINE critique du roi et de la caur par lâintermĂ©diaire de diffĂ©rents oiseaux » or 19 Sni* to View vers un thĂšme commun les oiseaux Nous allons voir comment Jean de la Fontaine critique la cour de Louis XIV Ă travers la personnification de ces oiseaux. Lâoiseau, symbole de lâamitiĂ©, de lâamour comme dans les deux pigeons » oĂč la Fontaine engage le lecteur Ă entretenir cette amitie et cet amour. Lâauteur utilise plusieurs fois le corbeau dans ses fables, symbole de la mort. Mais les oiseaux sont aussi qualifiĂ©s de majestueux, orgueilleux avec le hĂ©ron, de gourmands vec le corbeau et le milan, de serviteurs zĂ©lĂ©s et sots avec le faucon et la mouche, dâhonnĂȘtes avec la perdrix, toujours en noise » en parlant des coqs. Et pour finir, de supĂ©rieurs, de divins avec lâaigle lâoiseau Jupiter la poule et le dragon. Ce thĂšme est intĂ©ressant car cela permet de voir comment Jean de la Fontaine utilise ces animaux qui sont Ă la fois similaires par leur propre nom dâoiseau mais diffĂ©rents par leurs comportements et qualifications, afin de critiquer le roi Louis XIV et la cour tout en Ă©vitant la censure. Les fables de lâanthologie sont regroupĂ©es selon les aractĂ©ristiques et les qualitĂ©s de ces oiseaux. Plan Les deux pigeons ; livre IX, Le renard et la cigogne ; livre l, 18âŠ. Le milan et le rossignol ; livre IX, Le corbeau et le renard ; livre Le corbeau voulant imiter lg lâhirondelle ; livre X, 6.. âŠâŠ. 10 Les vautours et les pigeons ; livre VII, La perdrix et les coqs; livre X, La poule aux Ćufs dâor ; livre V, 13âŠâŠ Les deux coqs ; livre VII, 13⊠Le coche et la mouche ; livre VII, Le faucon et le chapon , livre VIII, 21 ⊠12 Le dragon Ă plusieurs tĂȘtes et le dragon Ă plusieurs queues ; Le hĂ©ron ; livre VII, 4. Les deux pigeons ? les deux pigeons » est une fable extraite du livre IX des fables, oĂč la Fontaine engage le lecteur Ă approfondir et ? livre rechercher lâamltiĂ© et lâamour dans le but dâatteindre le bonheur. Le pigeon est un oiseau plutĂŽt ordinaire, lâauteur lâutilise afin de reprĂ©senter une partie de la societĂ© simple de son temps. ravaux, Les dangers, les soins du voyage, Changent un peu votre courage. Encor, si la saison sâavançait davantage ! Attendez les zĂ©phyrs. Qui vous presse ? un corbeau Tout Ă lâheure annonçait malheur Ă quelque oiseau. Je ne songerai plus que rencontre funeste, Que faucons, que rĂ©seaux. ? HĂ©las, dirai-je, il pleut Mon frĂšre a-t-il tout ce quâil veut, Bon soupĂ©, bon gĂźte, et le reste ? » Ce discours Ă©branla le cĆur De notre imprudent voyageur Mals le dĂ©sir de voir et lâhumeur inquiĂšte LâemportĂšrent enfin. Il dit Ne pleurez point ; Trois jours au plus rendront mon Ăąme satisfaite Je reviendrai dans peu conter de point en point Mes aventures Ă mon frĂšre ; Je le dĂ©sennuierai. Quiconque ne voit guĂšre Nâa guĂšre Ă dire aussi. Mon voyage dĂ©peint Vous sera dâun plaisir extrĂȘme. Je dirai JâĂ©tais lĂ ; telle chose mâavint; » Vous y crolrez ĂȘtre vous-mĂȘme. ? A ces mots, en pleurant, ils se dirent adieu. Le voyageur sâĂ©loigne ; et voilĂ quâun nuage Lâoblige de chercher retraite en quelque lieu. Un seul arbre sâoffrit, tel encor que lâorage Maltraita le pigeon en dĂ©pit du feuillage. Lâair devenu serein, il part tout morfondu, SĂšche du mieux quâil peut son corps chargĂ© de pluie, Dans un champ Ă lâĂ©cart voit du blĂ© rĂ©pandu, Voit un pigeon auprĂšs cela lul donne envie ; Il y vole, il est pris ce blĂ© couvrait dâun las Les menteurs et traĂźtres appas. Le las Ă©tait usĂ© si bien que, de son aile, De ses pieds, de son bec, lâoiseau le rompt enfin Quelque plume V pĂ©rit et pĂ©rit et le pis du destin Fut quâun certain vautour Ă la serre cruelle, Vit notre malheureux qui, traĂźnant la ficelle Et les morceaux du las qui lâavaient attrapĂ©, Semblait un forçat Ă©chappĂ©. Le vautour sien allait le lier ,quand des nues Fond Ă son tour un aigle aux ailes Ă©tendues. Le pigeon profita du conflit des voleurs, Sâenvola, sâabattit auprĂšs dâune masure, Crut, pour ce coup, que ses malheurs Finiraient par cette aventure ; Mais un fripon dâenfant cet Ăąge est sans pitiĂ© prlt sa fronde, et, du coup, tua plus dâĂ moitiĂ© La volatile malheureuse, Qui, maudissant sa curiositĂ©, TraĂźnant lâaile et traĂźnant le piĂ©, Demi-morte et demi-boiteuse, Droit au logis sâen retourna Que bien que mal elle arriva Sans autre aventure fĂącheuse. VoilĂ nos gens rejoints ; et je laisse Ă juger De combien de plaisi s ils payĂšrent leurs peines. Amants, heureux amants, voulez-vous voyager ? Que ce soit aux rives prochaines. Soyez-vous lâun Ă lâautre un monde toujours beau, Toujours divers, toujours nouveau Tenez-vous lieu de tout, comptez pour rien le reste. Jâai quelquefois aimĂ© je nâaurais pas alors Contre le Louvre et ses trĂ©sors, Contre le firmament et sa voĂ»te cĂ©leste, ChangĂ© les bois, changĂ© les lieux HonorĂ©s par le pas, Ă©clairĂ©s par les yeux De lâaimable jeune bergĂšre Pour qui, sous le fils de CythĂšre, Je sepuâis, engagĂ© par mes premiers serments. HĂ©las ! Quand reviendront s moments ? PAGF s OF lg au grĂ© de mon Ăąme inquiĂšte ? Ah! si mon coeur osait encor se renflammer ! Ne sentirai-je plus de charme qui mâarrĂȘte ? Al-je passĂ© le temps dâaimer ? 2 Le renard et la cigogne le renard et la cigogne » est une fable extraite du livre I ; la Fontaine prĂ©sente deux personnages qui sâopposent le renard est plutĂŽt Ă©goĂŻste alors que la cigogne elle est plus mise en valeur ar lâauteur car câest un oiseau gracieux et intelligent. CompĂšre le Renard se mit un jour en frais, Et retint Ă diner commĂšre la Cigogne. Le rĂ©gal fut petit et sans beaucoup dâapprĂȘts Le galand, pour toute besogne, Avait un brouet clair il vivait chichement. Ce brouet fut par lui servi sur une assiette La cigogne au long bec nâen put attraper miette, Et le drĂŽle eut lapĂ© le tout en un moment. Pour se veneer de cette tr PAGF 6 OF lg Serrant la queue, et portant bas lâoreille. Trompeurs, câest pour vous que jâĂ©cris Attendez-vous Ă la pareille. Le milan et le rossignol ? le milan et le rossignol » est une fable extraite du livre IX ; Jean de la Fontaine met en Ćuvre deux oiseaux dont un est pris par la faim le milan. Pour sauver sa peau, le rossignol essaye tant bien que mal de convaincre le milan de lâĂ©couter chanter. Dans cette fable, La Fontaine dĂ©nonce la supĂ©rioritĂ© de lâinstant face Ă la raison. AprĂšs que le milan, manifeste voleur, Eut rĂ©pandu lâalarme en tout le voisina e, Et fait crier sur lui les enfa extraite du livre ; dans cette fable figure un renard, rusĂ© et flatteur, et un corbeau naĂŻf. La Fontaine critique deux grands acteurs de lâĂ©poque le ourtisan le renard et une personne de pouvoir le corbeau. Maitre corbeau, sur un arbre perchĂ©, Tenait en son bec un fromage. MaĂźtre renard par lâodeur allĂ©chĂ© , Lui tint Ă peu prĂšs ce langage Et bonjour Monsieur du corbeau. Que vous ĂȘtes joli! que vous me semblez beau! Sans mentir, si votre ramage Se rapporte Ă votre plumage, Vous ĂȘtes le phĂ©nix des hĂŽtes de ces bois» A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie; Et pour montrer sa belle voix, Il ouvre un large bec laisse tomber sa proie. Le renard sâen saisit et dit Mon bon Monsieur, Apprenez que tout flatteur Vit aux dĂ©pens de celui qui lâĂ©coute Cette leçon vaut bien un fromage sans doute. Le corbeau honteux et confus Jura mais un peu tard , quâon ne lây prendrait plus. Un vrai mouton de sacrifice On lâavait rĂ©servĂ© pour la bouche des Dieux. Gaillard Corbeau disait, en le couvant des yeux Je ne sais qul fut ta nourrice ; Mais ton corps me paraĂźt en merveilleux Ă©tat Tu me serviras de pĂąture Sur lâanimal bĂȘlant Ă ces mots il sâabat. La moutonniĂšre crĂ©ature Pesait plus quâun fromag ; outre que sa toison Ătait dâune Ă©paisseur extrĂȘme, Et mĂȘlĂ©e Ă peu prĂšs de la mĂȘme façon Que la barbe de PolyphĂšme. Elle empĂȘtra si bien les serres du Corbeau, Que le pauvre Animal ne put faire retraite. Le Berger vient, le prend, lâencage bien et beau Le donne Ă ses enfants pour servir dâamusette. Il faut se mesurer; la consĂ©quence est nette Mal prend aux volereaux de faire les voleurs. Lâexemple est un dangereux leurre Tous les mangeurs de gens ne sont pas grands seigneurs ; OĂč la guĂȘpe Ă passĂ©, le moucheron demeure. 6 LâaraignĂ©e et lâhirondelle PAGF lg ce maudit oiseau Je lâai tissu de matiĂšre assez forte. » Ainsi, dâun discours insolent, Se plagnait lâaraignĂ©e autrefois tapissiĂšre, Et qui, lors Ă©tant filandiĂšre, PrĂ©tendait enlacer tout insecte volant. La sĆur de PhilomĂšne, attentive Ă sa proie, MalgrĂ© le bestion happait mouches dans lâair, Pour ses petits, pour elle, impitoyable joie, Que ses enfants gloutons, dâun bec toujours ouvert, Dâun ton demi-formĂ© , bĂ©gayante couvĂ©e, Demandaient par des cris encor mal entendus. La pauvre aragne nâayant plus Que la tĂȘte et les pieds, artisans superflus, Se vit elle-mĂȘme enlevĂ©e L hirondelle, en passant, emporta toile, et tout, Et lâanimal pendant au bout. Jupin pour chaque Ă©tat mit deux tables au monde Lâadroit, le vigilant, et le fort sont assis A la premiĂšre; et les petits Mangent leur reste Ă la seconde.
DissertationIntroduction: Jean de La Fontaine, Ă©crivain français du XVIIĂšme siĂšcle, publie son premier recueil Fables Choisies en 1668. Les fables du recueil sont des rĂ©cits courts mettant en scĂšne des animaux et dĂ©livrant lâesprit critique et proposant une morale.Il est dâabord important de noter que La Fontaine a pris grand soin de ne pas rĂ©unir ses textes au hasard, puisque leur classement ne correspond pas aux dates de composition quâon peut connaĂźtre. Il y a donc une volontĂ© - quâelle rĂ©ponde Ă une stratĂ©gie de la dĂ©soÂrientation ou Ă lâinstallation dâune problĂ©matique ou de plusieurs problĂ©matiques - il y a une volontĂ© derriĂšre ce faux dĂ©sordre. En outre, il est clair que par moments, lâarticulation des fables correspond nettement Ă la volontĂ© dâinstituer des micro-sĂ©quences thĂ©matiques, des suites les fables 9 Ă 14 du livre VII traitent de la forÂtune, les fables 10 et 11 du livre VIII, de lâamitiĂ©, les fables 1, 3, 5, 7, 14, du livre X, de la souverainetĂ© et de la tyrannie de lâhomme sur les animaux, etc. Mais sur lâensemble du recueil, que voit-on ? Livre VII Du flĂ©au de la guerre ?, Les Animaux malades de la peste, Ă lâhymne Ă la paix, Un Animal dans la lune. Le livre VII est centrĂ© sur les questions de la paix et de la guerre et plus spĂ©cifiquement de la guerre de Hollande, moins glorieuse quâon lâa souvent cru. La guerre ne retombant ni sur le roi ni sur les Grands, elle retombe sur lâĂąne, comme les impĂŽts sur le peuple. La guerre ne modĂšre pas lâĂ©goĂŻsme du clergĂ© VII, 3. Lâune des leçons est quâon ne sâest pas accommodĂ© entre nations et quâon y a beaucoup perdu Le HĂ©ron et la Fille, VII, 4 en voulant trop gagner. La seconde morale est que le monde est happĂ© par le trop » trop vouloir, trop conquĂ©rir... Ce quâil faut rechercher câest la mĂ©diocritĂ© » et la sagesse Les Souhaits, VII, 5, et ce nâest pas Ă la Cour vrai charnier quâon lâapprend la Cour sent la mort, on nây peut ni blĂąmer, ni louer VII, 6. Il est alors proprement dangereux de mĂ©diter, parce quâon devient vulnĂ©rable devant la force Les Vautours et les Pigeons, VII, 7 et que lâon devient proie. Ceux qui ne mĂ©ditent pas, ceux qui sâagitent et font les imporÂtuns Le Coche et la Mouche, VII, 8 en sont les parasites et accroissent les difficultĂ©s de lâĂtat. Outre lâagitation des uns, la violence des autres, il y a aussi le rĂȘve dĂ©raiÂsonnable qui mĂšne le monde et entraĂźne les guerres picrocholines ou autres et fait tout chuter VII, 9,10. Il ne faut donc pas courir aprĂšs la fortune VII, 11. Il est trop facile de se faire gloire de ses succĂšs et dâattriÂbuer Ă la Fortune ses propres revers personnels VII, 13, dâautant que le monde est parcouru dâopinions fausses sur lesquelles il est aisĂ© de jouer VII, 14. Dans ce monde violent, il nây a pas de mĂ©diateur possible, surtout lorsquâil est Ă©manation de lâĂtat VII, 15, fĂ»t-il juge, et ce monde ne court que vers la division et la mort VII, 16. Devant ce tableau fort sombre des folies et des horreurs de la guerre et du pouvoir, la modĂ©raÂtion des hommes et des rois est-elle encore possible ? Lâespoir rĂ©siderait-il dans la paix et la science, puisque lâAngleterre nous en donne lâexemple VII, 17 ? Reste la deuxiĂšme fable du livre VII, sorte de fabliau quâon a bien du mal Ă relier Ă la dĂ©monstration, sauf Ă considĂ©rer quâon reporte sur les affaires privĂ©es lâhorÂreur des querelles publiques, mais câest Ă©videmment difficile et peu lĂ©gitime. Livre VIII La mort et les jeux de langage sont les deux topiques du livre VIII. De la fable La Mort et le Mourant Ă celle titrĂ©e Le Loup et le Chasseur, la cruautĂ© de la mort encadre une rĂ©flexion sur les charmes et les mĂ©faits de la parole. GrĂące au discours faux, on peut se tirer dâaffaire et tuer les autres VIII, 3, Le Lion, le Loup et le Renard ; lâĂ©loÂquence de DĂ©mosthĂšne est inopĂ©rante au point quâil faut se fonder sur les rĂ©cits et les contes pour sĂ©duire les hommes VIII, 4, Le Pouvoir des Fables, toute paroÂle semble inutile, tout fatigue, les dieux en particulier en sont les premiers fatiguĂ©s VIII, 5, tout est dĂ©formĂ© VI11, 6, Les Femmes et le Secret et vain, bons mots pour les sots 8 ou hĂąbleries 9. Alors, mieux vaut se taire et rĂȘver de pure amitiĂ© 11, sans illusion. La parole est utile lorsquâelle interÂvient dans une sociĂ©tĂ© fondĂ©e sur son illusion 14 mais se heurte Ă la rĂ©alitĂ© 15. Il faudrait, face aux faux disÂcours 16, savoir sâentraider 17 et prĂ©fĂ©rer la morale, lâapologue, Ă lâignorance et au bavardage 18, 19, mais est-ce au moins possible ? MĂȘme Jupiter parle en vain 20 et lâon doit rĂ©sister aux mots et aux conseils des autres 21 pour se sauver soi-mĂȘme. Aucune confiance ne doit donc ĂȘtre faite aux apparences, le naturel est le naturel et le chat reste un chat, malgrĂ© son discours 22, 25, 26 le sage se mĂ©fie des entretiens frivoles. Le lanÂgage tue, sauve aussi lorsquâon le maĂźtrise dans une sociĂ©tĂ© fondĂ©e sur ses jeux et ses apparences, mais Ă condition quâon ne le croie, Ă aucun moment, vĂ©ritable. La communication vraie, fondĂ©e sur les vertus de lâamitiĂ© et de lâentraide, est bien loin, Ă lâhorizon du texte, mais nâest-elle pas seulement une vue de lâesprit ? Le Savetier et le Financier, Les Deux Chiens et lâĂne mort nous apprennent quâil faut renoncer aux ambitions mortelles et rester dans son monde. Lâexemple du chien qui porte Ă son cou le dĂźner de son maĂźtre montre que la cupiditĂ© est universelle, et que lâĂ©ducation est une vertu qui nâest jamais dĂ©finitive puisquâon peut la perdre. Lâhomme, guettĂ© par la mort, se dĂ©bat dans un univers trompeur dans lequel il doit se mĂ©fier de ses semÂblables, mais ce mĂȘme homme ne peut, et câest sa destinĂ©e, que rester dans le monde et, malgrĂ© tout, en jouir Le Loup et le Chasseur Il faut que lâon jouisse ». Livre IX Le livre IX expose lâordre de lâunivers et suggĂšre une morale quasi religieuse. Lâhomme, par nature, est amenĂ© Ă trop vouloir. Le pigeon apprend quâil aurait mieux fait de rester au gĂźte 2, il vaut mieux que les arbres aient des glands que des citrouilles 3, le pĂ©dant a tort de vouloir trop corriger ses Ă©lĂšves 5 lâordre est divers, certes 7, 12, mais il est ordre et loi, supĂ©rieur Ă toute autre loi, en particulier paĂŻenne 6. Ne changeons rien, Ă©vitons les disputes 9, fuyons ceux qui vendent la sagesse 8, ne nous fions pas Ă lâhypocrisie 14 et connaissons notre nature, mĂȘme si dans lâexcĂšs rĂ©side une sorte de grandeur 15. Est-ce pour autant une nature divine, y a-t-il un dieu qui gĂšre le monde ? Les priĂšres sont bien vaines 13 et Dieu reste impĂ©nĂ©trable 16. Vivons donc, mais en pleine dĂ©fiance des autres, des flatteurs 17, des plaisirs et des mythes 18, des harangues 19, et reconnaissons lâordre gassendiste le discours Ă Mme de la SabliĂšre les animaux ont une Ăąme terrestre, les hommes ont une Ăąme cĂ©leste et terrestre. Les allers et retours entre lâhomme et Dieu, dans ce livre, tĂ©moignent dâune orgaÂnisation de lâunivers en tant quâordre divers, multiple, et de ses dĂ©viations. Le Singe et le LĂ©opard, mĂ©ditation sur la diversitĂ©, peut nous surprendre, mais peut entrer dans la cohĂ©Ârence car il insiste sur les apparences... Livre X Le livre X montre lâhomme dominant la nature et ses semblables 1 lâhomme est dĂ©voration, les animaux sont dĂ©voration, la nature est dĂ©voration 1, 3, 5 la chaĂźne est constituĂ©e avec rigueur. Lâhomme est Ă la fois le roi des animaux et leur tyran 8. Il faut donc Ă©viter les rois 9, comme les animaux doivent Ă©viter les hommes 10, 11, 12, jusquâĂ Dieu, peut-ĂȘtre, qui foudroie les hommes Discours Ă M. le duc de La Rochefoucauld. Dans ces conditions, pourquoi La Tortue et les deux Canards 2, LâEnfouisseur et son CompĂšre 4, Les deux Aventuriers et le Talisman 13, condamnant lâimpudenÂce, le babil et la sottise ? Peut-ĂȘtre pour consoler les faibles en leur disant quâon peut tromper les trompeurs et que la puissance est une ombre. Garder lâordre et se consoler, surtout ne rien changer de peur que tout soit pire encore... Livre XI Le livre XI revient aux puissants et Ă la politique, peut-ĂȘtre Ă la guerre de Hollande. 11 faut cĂ©der au lion ou lâempĂȘcher de grandir. Lorsquâil est grand, il faut faire avec 1. Il faut avoir le dĂ©sir de plaire et compter sur soi 2, 3 et, si lâon peut, fuir loin de la Cour 4, parce quâil nây a pas grand-chose Ă attendre des rois et que les plaines danubiennes lui sont prĂ©fĂ©rables, mĂȘme si Louis sait dompter lâEurope Ăpilogue. Restent donc la sauvagerie du paysan du Danube ou le jardin du vieillard comme seules issues. Mais pourquoi le renard est-il reprĂ©sentĂ© trompant le loup 6 ? Que vient faire le chat-huant accumulateur 1 ? Des leçons politiques peuvent en ĂȘtre tirĂ©es le loup travaille pour le renard qui travaille pour le roi, le roi-hibou conserve de la chair fraĂźche et grasse pour se repaĂźtre... Articles liĂ©s aux Fables de La Fontaine La fable dĂ©finition, caractĂ©ristiques et exemples L'apologue analyse du texte "Le pouvoir des fables" de jean de La Fontaine. La laitiĂšre et le pot au lait lecture analytiqueLegenre de la fable est aujourd'hui un grand genre mais il n'en Ă©tait pas de mĂȘme avant l'Ă©poque de La Fontaine. En Ă©crivant des fables, celui-ci tourne le dos Ă la tragĂ©die, qui est alors considĂ©rĂ© comme le genre noble, et s'intĂ©resse Ă un genre mineur. Il s'inspire d'Esoppe dont les fables sont lies en France depuis le XVIĂšme
Nombreux sont les français et les françaises qui depuis des gĂ©nĂ©rations ont vibrĂ© Ă la lecture des Fables de La Fontaine, quâelles aient Ă©tĂ© enseignĂ©es en classe, apprises par cĆur Ă la maison, ou lues tout haut avec leurs parents ou leurs grands-parents. Qui ne se souvient pas des phrases les plus connues et qui demeurent familiĂšres encore aujourdâhui car elles sont entrĂ©es dans le langage commun La raison du plus fort est toujours la meilleure », On a souvent besoin dâun plus petit que soi », Rien ne sert de courir il faut partir Ă point », ou les rĂ©fĂ©rences Ă vendre la peau de lâours », Ă la montagne qui accouche dâune souris », Ă qui est pris qui croyait prendre » et Ă Aides-toi le Ciel tâaidera » ? Qui peut oublier tous ces lapins, tortues, corbeaux, fourmis, renards, lions, agneaux, et autres animaux qui se parlent entre eux avec tant de naturel malgrĂ© lâaspect irrĂ©el de ces conversations ? Qui peut ignorer les multiples illustrations des Fables par les peintres et artistes entre le 17e et le 21e siĂšcle ? Or, si nous connaissons certaines des fables et que nous pouvons rĂ©citer celles-ci par cĆur, peu de lecteurs ou lectrices connaissent la vie de lâauteur, ni les profonds messages que les fables transmettent. La Fontaine nâa publiĂ© ses premiĂšres Fables quâen 1668 alors quâil avait dĂ©jĂ 47 ans. Le premier livre Ă©tait dĂ©diĂ© au Dauphin, fils de Louis XIV, qui avait sept ans. Dans cette premiĂšre PrĂ©face La Fontaine annonce dĂ©jĂ le but de ses Ă©crits. Il convient que le jeu et lâamusement font partie des premiĂšres annĂ©es du petit prince mais en mĂȘme temps lui rappelle quâil doit donner quelques-unes de ses pensĂ©es Ă des rĂ©flexions sĂ©rieuses ». La deuxiĂšme partie de cette PrĂ©face rend hommage Ă ses prĂ©dĂ©cesseurs classiques tels PhĂšdre, Aristote et autres fabulistes animaliers, suivi dâun long essai sur Ăsope, son maĂźtre dont il fait un Ă©loge vibrant Je chante les hĂ©ros dont Ăsope est le pĂšre ». Certaines des Ćuvres de ce dernier font dâailleurs leur apparition dans le recueil des Fables suivies dâun texte de notre poĂšte qui reformule lĂ©gĂšrement celles de son hĂ©ros. Les fables Ă©taient Ă la mode Ă lâĂ©poque pendant laquelle La Fontaine Ă©crivit les siennes et beaucoup sây essayaient. Cepedant ce qui Ă©tait surtout apprĂ©ciĂ© Ă©tait une littĂ©rature lĂ©gĂšre truffĂ©e de rĂ©fĂ©rence aux animaux. MalgrĂ© son admiration pour Ăsope, de qui il disait tenir son inspiration, ainsi que les Ćuvres dâHorace et de SĂ©nĂšque, des fabliaux du moyen Ăąge et des fables colportĂ©es dâInde, de Chine et des pays arabes, La Fontaine avait une autre forme en tĂȘte. Dans ses nombreuses prĂ©faces il thĂ©orisa le style de ses fables celles-ci devaient Ă©viter la longueur et lâobscuritĂ© mais il fallait quâelles aient du piquant, et elles devaient ĂȘtre gaies afin de capter lâattention de ses lecteurs pour mieux leur enseigner une morale universelle. Elles devaient donc allier le charme et le plaisir avec la raison et lâinstruction Ces Fables ne semblent pas ce quâelles semblent ĂȘtre. Le plus simple Animal nous y tient lieu de MaĂźtre. Une morale nue apporte de lâennui ; le conte fait passer le prĂ©cepte avec lui. En ces sortes de Feintes il faut instruire et plaire ». Le Lion et le Chasseur Laurent Cars 1699-1771 Gravure rĂ©alisĂ©e par Laurent Cars dâaprĂšs un dessin de Jean-Baptiste Oudry reprĂ©sentant la fable Le lion et le chasseur de Jean de La Fontaine fable 2 du livre VI DĂšs cette premiĂšre PrĂ©face, La Fontaine expliqua aussi au Dauphin pourquoi il avait choisi de mettre les animaux sur le devant de la scĂšne de ses fables Les propriĂ©tĂ©s des animaux et leurs divers caractĂšres y sont exprimĂ©s ; par consĂ©quent les nĂŽtres aussi, puisque nous sommes lâabrĂ©gĂ© de ce quâil y a de bon et de mauvais dans les crĂ©atures irraisonnables. » Ce serait lĂ son thĂšme principal, rĂ©itĂ©rĂ© de nombreuses fois Or vous savez Iris de certaine science, Que quand la bĂȘte penserait, La bĂȘte ne rĂ©flĂ©chirait Sur lâobjet, ni sur sa pensĂ©e. Descartes va plus loin, et soutient nettement Quâelle ne pense nullement. Vous nâĂȘtes point embarrassĂ©e De le croire ni moi.» Discours Ă Madame de la SabliĂšre Lâhomme agit et il se comporte, En mille occasions comme les animaux. » Discours Ă Monsieur le Duc de La Rochefoucauld La Fontaine Ă©tait un homme complexe et talentueux, malgrĂ© la lĂ©gende qui voudrait quâil ait Ă©tĂ© constamment dĂ©sargentĂ©, un parasite, un libertin toujours Ă lâaffĂ»t de mĂ©cĂšnes, un homme qui Ă©voluait dans les salons luxueux des aristocrates riches et oisifs qui entouraient Louis XIV Ă une pĂ©riode oĂč festins et bals costumĂ©s Ă©taient Ă leur apogĂ©e, et qui Ă©crivait des fables lĂ©gĂšres et distrayantes. Il est vrai quâavide de libertĂ© le poĂšte avait abandonnĂ© la sinĂ©cure dont il avait hĂ©ritĂ© en tant que MaĂźtre des Eaux et des ForĂȘts dans sa Champagne natale, car ce travail lâennuyait. Il est vrai aussi quâen ce faisant il abandonnait sa femme et son fils quâil dĂ©laissa pour partir Ă Paris. Mais câĂ©tait un homme qui Ă©tait toujours restĂ© attachĂ© aux souvenirs de son enfance dans la campagne oĂč il Ă©tait nĂ©, oĂč il avait Ă©tĂ© Ă©levĂ©, et dans laquelle il avait pu observer la nature et les animaux qui lâentouraient. CâĂ©tait aussi un homme qui, par lâintermĂ©diaire de ses fables animaliĂšres, critiqua inlassablement le pouvoir arbitraire et injuste de la royautĂ© et railla la frivolitĂ© et lâhypocrisie des courtisans qui lâentouraient. Il ne se laissa jamais contrĂŽler par lâabsolutisme royal et ne cessa dâĂ©mettre des jugements sĂ©vĂšres sur les abus du roi et de ses ministres. La Fontaine, nĂ© en 1621 Ă ChĂąteau-Thierry, avait brĂ»lĂ©, comme beaucoup de jeunes poĂštes, de rejoindre Paris et dây mener la vie dont il rĂȘvait entre les dĂźners littĂ©raires bien arrosĂ©s, les nuits entiĂšres passĂ©es Ă partager leurs Ă©crits et la compagnie de jolies parisiennes ; il y arriva donc Ă la fin des annĂ©es 1750. Câest Ă Paris quâil fit la connaissance de MoliĂšre, Racine et Corneille. Il Ă©tait entourĂ© dâun cercle de poĂštes qui avaient créé un havre pour la poĂ©sie et la littĂ©rature en gĂ©nĂ©ral et espĂ©raient quâils pourraient convaincre le nouveau roi de lâimportance des Lettres pour le royaume. CâĂ©tait un poĂšte prolifique il Ă©crivit 240 fables, 64 contes, des romans en prose, deux livrets dâopĂ©ra, deux tragĂ©dies, deux comĂ©dies, un ballet, des Ă©pĂźtres, des sonnets, des madrigaux, des rĂ©cits de voyage, et des lettres, et qui fut membres de lâAcadĂ©mie. CâĂ©tait aussi un homme qui mettait lâamitiĂ© au-dessus de toute valeur Chacun se dit ami ; mais fol qui sây repose rien nâest plus commun que ce nom ; rien nâest plus rare que la chose. » Parole de Socrate. Un ami vĂ©ritable est une douce chose. Il cherche vos besoins au fond de votre cĆur; Il vous Ă©pargne la pudeur De les lui dĂ©couvrir vous-mĂȘme. Un songe, un rien, tout lui fait peur Quand il sâagit de ce quâil aime. » Les Deux Amis NoĂ«l Lemire 1724-1801 Gravure rĂ©alisĂ©e par NoĂ«l Le Mire dâaprĂšs un dessin de Jean-Baptiste Oudry reprĂ©sentant la fable Les deux amis de Jean de La Fontaine fable 11 du livre VIII Cependant un Ă©pisode marqua la vie de La Fontaine dâune façon indĂ©lĂ©bile. LĂ©lĂ©gant et astucieux intendant des finances, Fouquet, qui avait pris La Fontaine sous son aile Ă©tait devenu Ministre des Finances. Fouquet attisa la jalousie du jeune Louis XIV, et surtout de Colbert qui allait agencer sa chute. Louis XIV pris la dĂ©cision dâarrĂȘter Fouquet et, aprĂšs un procĂšs pendant lequel ce dernier se dĂ©fendit avec Ă©loquence, et bien que de nombreuses voix sâĂ©levĂšrent pour plaider sa cause, se prononça pour son enfermement dans une prison oĂč il devait croupir pendant le reste de ses jours. La Fontaine eut beau Ă©crire au roi un ardent plaidoyer pour faire libĂ©rer Fouquet â ce qui prĂ©sentait un risque pour son auteur â cela nâeut aucune influence. Cette injustice, cette dĂ©loyautĂ© et cette basse jalousie furent non seulement un moment de profonde tristesse pour le poĂšte mais furent un tournant majeur dans sa vie, et câest Ă ce moment que commencĂšrent Ă sâagiter dans son esprit les animaux qui seraient ses porte-paroles pour dĂ©crire lâimmoralitĂ© et lâinjustice quâil avait constatĂ©es. C est ce bestiaire qui lui apporterait enfin la gloire. La Fontaine mourut en 1695 laissant des fables qui pendant 350 ans lui survĂ©curent, qui sont inscrites dans le cĆur de tous les jeunes de France, et qui furent les plus lues, pastichĂ©es et illustrĂ©es que les Ă©crits de nâimporte quel Ă©crivain français. La Fontaine Ă©tait un commentateur de son temps, douĂ© dâun sens rare de lâobservation, et un insoumis Ă sa maniĂšre. Il choisit donc de faire jouer et parler les animaux qui Ă©taient les plus emblĂ©matiques des dĂ©fauts quâil constatait autour de lui lâarrogance, le pouvoir, la flagornerie, le mensonge, lâarbitraire, le mĂ©pris de la faiblesse. La familiaritĂ© de la campagne de son enfance, son observation des animaux pendant ses jeunes annĂ©es, et plus tard son expĂ©rience des hommes et femmes cultivĂ©s, lettrĂ©s et chaleureux dont les salons lui Ă©taient toujours ouverts comme ceux de Madame de SĂ©vignĂ©, Madame de Lafayette, et Madame de Montespan, ainsi que ses observations sur la cour, les ministres et les courtisans sâalliĂšrent pour aboutir Ă une critique redoutable mais masquĂ©e par des tableaux distrayants et apparemment inoffensifs. Ses Ă©crits purent paraĂźtre simplistes Ă certains mais ils dĂ©voilaient son jugement impitoyable sur le pouvoir absolu du monarque, la lĂąchetĂ© des courtisans obsĂ©quieux, son dĂ©goĂ»t pour les mensonges, la flatterie et lâattitude hypocrite de membres la cour Amusez les rois par des songes, Flattez-les dâagrĂ©ables mensonges, Quelque indignation dont leur cĆur soit remplie, Ils goberont lâappĂąt, vous serez leur ami. » Les ObsĂšques de la Lionne Illustration de Jean-Baptiste Oudry Dans lâallĂ©gorie animaliĂšre des Fables, les animaux qui y sont prĂ©sents sont symboliques, physiquement et par leurs paroles. Ils ont tous un rĂŽle bien prĂ©cis car chacun reprĂ©sente un stĂ©rĂ©otype le lion est puissant, cruel et orgueilleux, la fourmi travailleuse, le renard est rusĂ©, lâagneau doux, le loup sanguinaire, le lapin peureux, mais ce nest quâen analysant de prĂšs leurs paroles, leurs attitudes et leurs actions quâon se rend compte que le lion reprĂ©sente la puissance royale tyrannique, ou que lâagneau reprĂ©sente la faiblesse des pauvres devant cette tyrannie. Certains des animaux comme le renard Ă©voquent les courtisans qui gravitent autour de lâabsolutisme royal et dont la plus grande peur est dâĂȘtre bannis de la cour, dâautres dĂ©montrent les qualitĂ©s, les sacrifices et la sagesse des plus faibles et des plus humbles. Par leurs paroles ces animaux illustrent les comportements souvent risibles et nuisibles de leurs contemporains. Une des Fables les plus Ă©loquentes Ă ce sujet est intitulĂ©e La Cour du Lion, car dĂšs le dĂ©but il avait choisi le lion, cruel roi des animaux, pour reprĂ©senter le monarque. Dans cette fable le lion dĂ©cide de tenir une cour plĂ©niĂšre et dây inviter tous les principaux de son Ă©tat. Le Louvre Ă©tant un endroit fĂ©tide dont lâodeur est abominable, lâours, plutĂŽt balourd se bouche le nez et ainsi se fait renvoyer de lâĂ©vĂ©nement. Le singe, imitateur sans pareil, flatte le roi en approuvant sa colĂšre et sa sĂ©vĂ©ritĂ©, envers lâours, ce qui dĂ©plait au roi qui lui rĂ©serve le mĂȘme sort. Arrive le renard, rusĂ© et malin, comme nous lâavons vu dans Le Renard et le Corbeau et nombreuses autres fables, qui pour arriver Ă ses fins et Ă©chapper Ă lâopprobre, refuse de dĂ©crire lâodeur infĂąme en expliquant quâil a un rhume et quâil est donc sans odorat. Il Ă©vitera la punition. Ce dernier incarne ceux qui entourent le roi et ne font que le flatter sans pour autant faire preuve du stratagĂšme ingĂ©nieux adoptĂ© par le renard. La Fontaine conclue cette fable de la façon suivante Ne soyez Ă la Cour, si vous voulez y plaire, Ni fade adulateur, ni parleur trop sincĂšre ; Et tachez quelquefois de rĂ©pondre en Normand [1]. » [1] Expression qui veut dire rĂ©pondre Ă©vasivement. Illustration de Jean-Baptiste Oudry Les Animaux malades de la Peste, une des Fables les plus connues de La Fontaine, creuse le mĂȘme thĂšme. Quand les Animaux subissent lâattaque brutale de la Peste qui les tue les uns aprĂšs les autres, le Roi-Lion leur explique que la maladie provient de leur culpabilitĂ© et que chacun doit avouer ce quâil a fait de plus mal afin de faire reculer la douloureuse Ă©pidĂ©mie. Il ajoute que lui-mĂȘme est coupable dâavoir dĂ©vorĂ© des moutons et mĂȘme des bergers et annonce quâil compte se dĂ©vouer pour obtenir la fin de la peste. Cependant il exige que chacun sâaccuse Ă©galement de ses propres fautes. Or ni le renard rusĂ©, ni le tigre ou lâours hypocrites et lĂąches, avoue la moindre faute, et ils sont donc absous. Seul lâĂąne admet quâun jour il a broutĂ© dans un prĂ©, ce qui permet aux autres dâidentifier le coupable idĂ©al. LâĂąne est condamnĂ© Ă mort. Toujours avide dâillustrer lâarbitraire et lâinjustice de tels procĂšs, et visant les ministres et conseillers du roi, La Fontaine offre la morale suivante Selon que vous serez puissants ou misĂ©rable, Les jugements de Cour vous rendront blanc ou noir. » Le souverain ne sembla pas se rendre compte de ces accusations et railleries rĂ©pĂ©tĂ©es, peut-ĂȘtre parce quâil nâattachait aucune importance aux fables et ne les lisait donc pas. Les recueils de fables suivants se firent plus ironiques et plus railleurs avec de plus longs discours Ă ses amis pour rendre plus explicites ses Ă©crits et ses principes. Dans ses vers, La Fontaine sâest servie de tous les genres littĂ©raires lâallĂ©gorie, la parabole, la mĂ©taphore, lâanalogie, le symbole et lâemblĂšme, en attribuant aux animaux qui dialoguent les travers des ĂȘtres humains. Son dĂ©fi, quâil a relevĂ© avec maestria, Ă©tait de rĂ©concilier lâutile et lâagrĂ©able, de plaire Ă la fois aux jeunes et aux moins jeunes, dâinstruire et de distraire, de rĂ©unir le badinage et la sagesse morale, lâagrĂ©able et lâutile, en somme dâamuser et dâĂ©duquer en mĂȘme temps. CâĂ©tait le difficile Ă©quilibre auquel il aspirait et quâil a si bien atteint. Celui qui avait Ă©crit quâil faisait chanter les animaux » pour mieux les comparer aux hommes et aux femmes Ă©crivit Ă plusieurs niveaux aux enfants aussi bien quâaux adultes sur lesquels il espĂ©rait avoir une portĂ©e morale. En nous lĂ©guant ce dĂ©filĂ© dâanimaux mĂ©morables, il a superbement rĂ©ussi son pari Ă la fois de distraire et dâinstruire ses contemporains ainsi que tous ceux et celles qui de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration allaient se rĂ©jouir de ces lectures et se remĂ©morer ces leçons. Isabelle de Courtivron, le 19 mars 2018 Bibliographie critique Patrick Dandrey, La Fabrique des Fables essai sur la poĂ©tique de La Fontaine, Klincksieck, 1992 Marc Fumaroli, Le PoĂšte et le roi, Ă©ditions de Fallois 1997 Eric Orsenna, La Fontaine, Une Ă©cole buissonniĂšre, Stock, 2017 La Fontaine, Fables, texte intĂ©gral, Gallimard 1991
kHiL. 111 373 75 121 111 317 244 179 40